Fresques murales du cloitre de l'Abbaye d'Abondance

Vers 1430, des peintres piémontais proches de Giacomo Jaquerio réalisent un ensemble d'une vingtaine de fresques dans le cloître de l'Abbaye d'Abondance. Cette période correspond au règne d'Amédée VIII de Savoie, une période de croissance géographique et démographique des États de Savoie. Il y a indéniablement un lien entre le pouvoir et ses fresques: l'écusson de la Maison de Savoie est peint en-dessous de chaque fresque, et il n'est pas impossible que Amédée VIII a été représenté dans les Noces de Cana. On n'en sait toutefois pas plus.

Sur la vingtaine de fresques d'origine - leur nombre initial exacte est inconnu - 6 sont encore parfaitement identifiables: l'Annonciation, la Visitation, la Nativité, la Fuite en Égypte, Jésus au temple, et les Noces de Cana. Ses scènes ont la particularité d'être représentées dans des paysages et des décors de l'époques. Elles offrent donc un petit aperçu de la vie quotidienne de la région au XVème siècle. 
En outre, on entrevoie déjà les prémices de la Renaissance Italienne dans l'utilisation (encore maladroite) de la perspective et du dynamisme des personnages. 

Ces fresques représentent un ensemble apparemment unique en France de peintures piémontaises du XVème siècle. De plus, elles offrent un témoigne remarquable de la vie quotidienne de l'époque dans la région, elles marquent un lien avec la Maison de Savoie et elles annoncent déjà l'arrivée progressive de la Renaissance:


( Source )

La fuite en Egypte, montrant un paysage lacustre (peut-être le Lac Léman):


( Source )

Jésus au temple, montrant un début de perspective et un dynamisme très expressif des personnages:


( Source ) 

Les fresques se trouvent dans le cloître de l'Abbaye d'Abondance:


( 46°16'51.73" N 6°43'14.07" E )

Pierre tombale de Javarzay

Cette pierre tombale du XIIème siècle provenant de Javarzay présente sur ses deux bâtières un riche programme sculpté: des scènes de chasse à courre, des feuillages et un personnage debout devant un jeu de tric-trac.  

Cette représentation d'une scène de jeu sur une tombe de cette époque est rarissime (peut-être même unique en France). Une hypothèse plausible serait qu'il s'agisse d'un passe-temps apprécié du défunt, tout comme la chasse à courre. La tombe est en outre d'une grande qualité et dans un assez bon état de conservation:


( Source )

La bâtière représentant un tric-trac à droite (et une scène de chasse à courre à gauche): 


( Source )

La pierre tombale se trouve au Musée du Donjon de Niort:


( 46°19'31.11" N 0°27'53.62" W )

Joseph, le nègre

Impossible de parler de cette peinture sans parler de l'homme représenté dessus: Joseph nait en 1793 à Saint-Domingue. Il quitte l'île au moment de l'indépendance haïtienne et arrive à Marseille à 1804. Il gagne Paris et vie de petits boulot jusqu'à être engagé en 1808 comme acrobate dans la troupe de Madame Saqui.
En 1818, sa musculature imposante tape dans l'oeil du peintre Théodore Géricault qui l'engage comme modèle. Grace à la célébrité du peintre, il servira de modèle à de nombreux autres artistes. 
À partir de 1832, il devient l'un des trois seuls modèle masculins de l'École des Beaux-Arts de Paris et vie de son métier. Il continue à poser jusqu'à sa mort (après 1865).

Ainsi, Joseph, vous le connaissez déjà: c'est lui qui pose pour les trois personnages noirs du Radeau de La Méduse de Géricault (1818-1819) ou pour l'Étude de nègre (1836) de Théodore Chassériau pour le compte de Ingres. Mais de lui en tant que sujet, il semble n'existé que deux oeuvres: Étude d'homme de Géricault (1818-1819) conservée aux États-Unis et Joseph, le nègre de Adolphe Brune présenté au Salon de 1865. Ce dernier représente Joseph, assis, souriant mais entourés d'éléments qui l'exotisent. 

Ce portrait est donc le dernier de la personne noir la plus importante du monde l'art du XIXème siècle en France, sans aucun doute celui qui retranscrit le mieux la personnalité de Joseph au travers de son sourire (ses contemporains parlent unanimement d'une personne affable et douée de grandes qualités humaines et professionnelles). Par les éléments qui l'accompagnent sur le tableau et son titre, elle trahit toutefois le racisme de son époque:


( Source )

La peinture est exposée au Musée Henri-Martin de Cahors:


( 44°26'52.49" N 1°26'16.50" E )

N.B.: J'ai conservé le titre original de 1865 car, bien qu'il soit aujourd'hui inacceptable, il ne faut pas passer sous silence le racisme de l'époque. Je vous renvoie vers le dernier paragraphe de la description de l'oeuvre sur le site du musée qui justifie cette position.

Fragment de tente romaine 

En 1997, les fouilles du fossé de la chicane de la porte du camp (romain) A - si j'ai bien compris, il se trouvait au Sud de la colline d'Alésia - vont mettre au jour un fragment de cuir de chèvre de 50cm de long et 22cm de large. Ce fragment, très bien conservé par la présence d'eau, a pu être identifié par l'archéologue Carol van Driel-Murray comme étant le renfort d'angle d'une tente romaine pour 8 personnes.

Vu la nature de l'objet et le lieu de sa découverte, il ne fait aucun doute qu'il s'agisse d'un témoignage direct du siège d'Alésia (en 52 avant J-C). Même si on ne peut pas avancer mieux que la datation du 1er siècle avant J-C, cela en fait le plus vieux fragment de tente romaine connu en Europe, et le seul connu en France:


( Source )


( Source )

Le fragment se trouve au Musée Alésia - Centre d'interprétation à Alise-Sainte-Reine (la colline d'Alésia est celle de gauche et celle où a été retrouvé le fragment - si j'ai bien compris - est celle derrière le musée):


( 47°32'10.71"N 4°28'06.20" E )

Cloître de Notre-Dame-en-Vaux

Vers 1170-1180, le cloître de la collégiale Notre-Dame-en-Vaux à Châlons-en-Champagne est en construction. Par contre, à partir de là, les sources sont totalement muettes pour remettre cette construction dans son contexte: l'édifice était il déjà un lieu de pèlerinage - Ce qui lui a valu un classement au Patrimoine Mondial de l'UNESCO parmi les routes de Saint-Jacques-de-Compostelle en 1998 - ? Toujours est-il que le chapitre disposait visiblement de moyens importants vu le programme sculpté (nous y reviendrons plus bas).
Malheureusement, entre 1759 et 1766, le chapitre va préférer faire détruire le cloître plutôt que de payer les travaux de rénovation. Les vestiges sont enfuis directement sur place et son emplacement reste vide (à l'exception de la construction d'un maison canoniale - la maison d'un chanoine du chapitre - du côté Est de l'ancien cloître). 

De 1963 à 1976, des fouilles entreprises par Léon Pressouyre vont permettre de retrouver environ 3/4 des éléments d'origine. L'année 1976 marque aussi l'ouverture du Musée du cloître de Notre-Dame-en-Vaux qui expose les découvertes.

Au total, le musée expose 55 statue-colonnes et des chapiteaux richement ornés. Bien que ce genre de statue soit commune au XIIèe siècle en France, une telle profusion dans un seul monument ne semble pas avoir d'équivalent en France. De plus cet ensemble a été réalisé à un moment de transition entre l'Art Roman et l'Art Gothique. Il forme donc un jalon de l'histoire de la sculpture française.


( Source )


( Source )

Exemple de deux statue-colonnes. Certains détails sont encore romans comme les motifs répétitifs sur le bras du personnage de gauche ou le motif simplifié du bas de la robe du personnage de droite; dans le même temps, certains détails sont déjà gothique comme le réalisme et la finesse du reste des tenues ou la posture dynamique du personnage de droite:


( Source )

Les vestiges du cloître sont exposés dans le Musée du Cloître de Notre-Dame-en-Vaux à Châlons-en-Champagne:


( 48°57'28.14" N 4°21'48.63" E )

Jardin cubiste de la Villa Noaille

Avouons-le d'entrée de jeu: aucune source n'explique la genèse de cette oeuvre, ni les choix initiaux, ni son évolution (et les quelques traces historiques présentés sont souvent mal datées et à la véracité incertaine).
Ce qui est sûr, c'est que l'aménagement de ce jardin s'est fait à la demande des propriétaires, Charles et Marie-Laure de Noailles, la fin de la construction de la villa Noaille en 1925 (année de la fin de la construction de la première partie de la villa) ou 1926 selon les sources. Le projet prend place dans une cour triangulaire en contre-bas du projet (qui semble avoir été vraisemblablement prévue vide et fermée selon les plans de l'architecte Robert Mallet-Stevens).

L'aménagement du jardin est l'oeuvre de Gabriel Guevrekian - la raison de ce choix est à chercher du côté du fait que Guevrekian est alors un collaborateur de Robert Mallet-Stevens et vient de réaliser un jardin pour l'Exposition internationale des arts décoratifs de Paris de 1925 - qui réalise une composition géométrique et en pente qui convergeait initialement vers une statue de Jacques Lipchitz "La joie de vivre" posée sur la pointe. Certaines sources mentionnent que les parterres étaient initialement plantés de tulipes et d'orangers, avant que les plantations soient rapidement modifiées. Le jardin fini par disparaitre et n'est restauré qu'en 1986. 

En dépit de l'absence quasi-totale d'informations sur sa genèse et des modifications qu'il a subi, ce jardin reste la seule tentative avouée de réaliser un "jardin cubiste". Il reste aussi un des très rares jardins de la période de l'Entre-deux-guerres conservé (avec le Jardin Wilson de Montluçon par exemple), une période où l'accent est peu mis sur l'Art des jardins, mais dont il est un témoignage rare et éloquent du goût pour les formes géométriques et les couleurs vives (aussi bien pérennes comme sur les mosaïques que temporaires avec les tulipes par exemple):


( Source )

Le jardin se trouve au Sud-Est de la Villa Noaille à Hyères:


( 43°07'25.92" N 6°07'38.82" E )

Copie du retable de Montbéliard

Vers 1540, le comte Georges Ier de Wurtemberg-Montbéliard commande à Heinrich Füllmaurer un retable pour la chapelle du Château de Montbéliard. À sa mort, son fils, Frédéric Ier de Wurtemberg, emmène l'oeuvre à Stuttgart. Mais en 1634, suite à la bataille de Nördlingen (dans le cadre de la Guerre de Trente Ans), les troupes impériales des Habsbourgs pillent la région et emportent le retable à Graz puis à Vienne où il rejoint la Kunstkammer du duc Johann Friedrich de Württemberg. En 1781, il entre à la Musée d'Histoire de l'art de Vienne où il est toujours conservé aujourd'hui.

L'histoire aurait pu s'arrêter là... mais la Société d'émulation de Montbéliard est parvenue à obtenir les droits de l'oeuvre au près du musée viennois. Une copie a donc pu être réalisée par des artistes francs-comtois et alsaciens. 
La copie en bois d'épicéa peint reprend la composition d'origine faite de 3 paires de volets - chacun recouvert de 12 scènes de 41x28cm sur chaque face - recouvrant une scène centrale plus grande, la crucifixion. Au total, il rassemble 157 scènes. La copie a officiellement été présentée au 17 juin 2016.

Bien qu'il s'agisse d'une copie, sa retranscription minutieuse démontre toute la qualité de ce chef d'oeuvre de la Renaissance allemande. On comprend aisément la décision de la Société d'émulation de Montbéliard d'en demander les droits pour une copie, et plus extraordinaire encore, les avoir obtenu! Je n'ai en effet pas trouvé de cas semblable.

L'installation du retable le 17 juin 2016:


( Source )


( Source )

La copie du retable se trouve dans le Temple Saint-Martin de Montbéliard:


( 47°30'36.51" N 6°47'49.46" E )