Sujet: La source de la Volga - Voronovo - Russie Mer 17 Juin 2015 - 9:22
La source de la Volga, le plus long fleuve d'Europe qui, avec ses 3690 km, arrose un tiers de la Russie d'Europe. Pour l'ambiance couleur locale, ouvrez la vidéo ci-dessous, c'est une magnifique interprétation des "Bateliers de la Volga" par les choeurs de l'armée rouge.
La source, située dans les collines de Valdaï, à seulement 228 mètres d'altitude (étonnant pour un si long cours d'eau), se situe au nord-ouest de Moscou et au sud de Saint-Petersbourg.
57°15'4.68"N 32°28'4.76"E
Comme vous pouvez le voir sur cette carte, la Volga se jette dans la mer Caspienne à Astrakhan. Elle est navigable sur presque tout son cours grâce au nombreux aménagements, canaux et réservoirs créés au temps du communisme en Urss. source
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La route conduisant jusqu'à l'endroit où naît le plus grand fleuve d'Europe n'en est pas vraiment une: une piste de terre et de graviers défoncée, déformée, parfois effondrée. Et déserte, à l'exception de quelques jeunes à vélo portant des tee-shirts patriotiques «drink vodka, not soda»() et de babouchkas sorties d'une nouvelle de Tchekhov ou d'un roman de Bounine - cheveux rassemblés sous un fichu coloré, robe sombre recouverte d'un tablier blanc, chaussons de teille, fagot sur l'épaule. Ici, la vieille Russie n'est pas un vain mot ni une vue de l'esprit. Ni les Suédois, ni les chevaliers Teutoniques, ni la Horde d'Or, ni la Wehrmacht, ni les Rouges, ni les prédateurs capitalistes n'auront réussi à changer en profondeur ce peuple des champs, des rivières et des forêts, éternellement insensible aux soubresauts du monde terrestre. source
Règne en ces lieux peu fréquentés le plus doux des vacarmes: des pommes de pin tombant des arbres, des mésanges sifflotant leur bonheur, des becs-croisés grignottant tout leur soûl. Serpentant au milieu de marécages et d'une forêt de conifères qui tutoient les nuages, le chemin cahoteux bute brusquement sur une clairière au sommet d'un monticule, à la sortie du village de Voronovo (une dizaine d'isbas traditionnelles plus ou moins habitées). Sur une pierre a été gravée cette adresse: «Pèlerin russe, prête ton attention à la source de la Volga. C'est ici que naissent la pureté et la grandeur de la terre russe. C'est ici que se trouvent les sources de l'âme populaire russe. Garde-les en toi.» Nous nous approchons silencieusement de la plate-forme de bois de quelques mètres carrés surplombant un marais aux eaux jaunâtres. Celui-ci (qui le croirait?) donne naissance au ru ridicule qui, bientôt, arrosera un tiers de la Russie d'Europe, léchera les murs de Tver, Iaroslav, Nijni Novgorod, Kazan, Volgograd (ex-Tsarytsine, ex-Stalingrad) et Astrakhan, prendra ses aises sur une largeur de près de un kilomètre, accueillera sur son cours inférieur des milliers de bateaux de croisière, excavera des sables désertiques brûlants et se jettera, à l'aide de ses vastes bras, dans le plus grand lac du monde, la mer Caspienne, après une course de 3 700 kilomètres (Madrid-Moscou!). Toute la force du seigneur des fleuves européens est ici, dans sa faiblesse, sa petitesse, sa modestie originelles.
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Une minuscule chapelle a été érigée: à l'intérieur, un trou symbolisant la source et une icône de saint Nicolas-le-Miraculeux. Un homme est assis là. Il prie les pieds dans l'eau, insensible aux dizaines de moustiques recouvrant son crâne et sa barbe blanche, qui le font ressembler à un starets de l'ère tsariste. Monarchiste, alcoolique repenti, Vladimir Federov a un peu plus de 60 ans et considère la Volga comme un fleuve aussi sacré que le Jourdain. Il n'est pas le seul. Des enfants sont régulièrement baptisés dans ce cloaque gonflé de petites bulles inquiétantes. Des femmes s'y lavent le visage et y trempent leurs lèvres. Des paysans y jettent des petits papiers pliés sur lesquels sont inscrits leurs vœux les plus chers. Tous les 6 janvier, au moment de la Théophanie (l'équivalent orthodoxe de notre catholique Epiphanie), une immense croix est creusée dans la glace formée par le général Hiver. Et en juin, une procession religieuse s'élance de la source de «matouchka Volga» («petite mère Volga») pour suivre, à pied puis en bateau, le cours du fleuve jusqu'à son delta. source
A quelques dizaines de mètres de ce sanctuaire dont les piliers sont recouverts de grappes d'œufs de grenouille verdâtres, la cathédrale de la Transfiguration-du-Sauveur domine la colline arborée où nous nous trouvons. Elle est placée, comme la petite église en bois Saint-Nicolas toute proche, sous l'autorité de l'higoumena Sofia. «Au monastère bâti ici en 1649 sur oukase d'Alexis (le second tsar Romanov), raconte-t-elle, a succédé un couvent qui porte le nom d'Olga, première sainte russe orthodoxe. A l'époque communiste, les bâtiments ont été transformés en étables ou en entrepôts de bois et de légumes, les croix et les icônes abattues et brûlées, les moniales enlevées et pour certaines emmurées.» Réhabilité, le couvent abrite toute l'année une poignée de moniales et quelques novices. L'hiver, personne ne s'aventure dans les parages, recouverts de plusieurs mètres de neige. Les femmes de Dieu demeurent seules. Enfin presque. «Un ours vit à un kilomètre d'ici. On l'aperçoit parfois quand nous partons cueillir des champignons au printemps», précise l'higoumena, que la perspective d'une attaque du plantigrade semble moins effrayer que celle de manquer les vêpres. Gambadent aussi alentour des loups et des élans. «Tâchez de ne pas en croiser un avec votre voiture: vous finiriez ratatinés», nous glisse-t-elle avec un petit sourire, avant de regagner son austère isba - là où il y a de la simplicité, il y a une centaine d'anges, disent les orthodoxes. source de ce beau texte de Jean-Christophe Buisson
Cet article était aussi le message de conclusion du défi image classique N° 105.
gollum Globe-Surfeur "Or" (niv 6)
16883 Gironde Electron libre Ne pas s'approcher, ruine dangereuse.
Sujet: Re: La source de la Volga - Voronovo - Russie Mer 17 Juin 2015 - 9:41
Merci Cramion de nous faire partager les résultats de ces défis qu'on regarde avec un peu trop de distraction, faut le reconnaitre.
Mais le forum est maintenant une GROSSE machine et tout suivre devient moins facile qu’auparavant, d'autant qu'on a nos propres trouvailles à soumettre et le retour sur certains topic qu'il faut "retaper".